vendredi 10 décembre 2010

III. Analyse des procès du sang contaminé.

La commission d’instruction a élevé certaines informations parues dans la presse au rang de preuves. Pourtant, à l’époque, la presse écrite n’a pas été plus avisée que les « acteurs », même si elle s’est installée plus tard dans un rôle de procureur rétrospectif. Par ailleurs, on constate le commentaire du tribunal correctionnel de Paris dans un procès pour diffamation qui oppose la juge d’instruction Bertella-Geffroy à un journaliste. Ce commentaire relève que : « l’opinion publique et la pression des victimes peuvent constituer des paramètres que le juge peut parfaitement intégrer dans sa décision sans pour autant trahir sa mission ni faire preuve de servilité. » Comme si les médias relataient l’opinion publique, ce qui reste à démontrer. Le journaliste est un acteur principal dans une société où l’opinion est un objet privilégié du gouvernement.
Le pouvoir judiciaire veut s’émanciper du pouvoir politique, mais devient dépendant de la presse et de l’opinion publique. De ce point de vue l’affaire du sang contaminé est une illustration inquiétante de l’alliance entre la presse et la justice. Deux pouvoirs qui de nos jours revendiquent la responsabilité des autres pouvoirs, tout en gardant jalousement leur propre irresponsabilité et leur secret professionnel. On comprendra que ce duo revendique, ni plus, ni moins, que la souveraineté et le pouvoir de contrôler les autres, sans être soi-même contrôlé.
Les médias sont nécrophages et sexuels. Le sexe et la mort parlent en direct. Le mystère et le drame, la peur, puis les « coupables » seront les thèmes et les clefs à succès, employés par les uns comme par les autres. Lynchage et discours de mandarins occuperont l’espace médiatique afin de créer l’émotion et le spectacle. Les journalistes ne sont pas les seuls fabricants d’information : Le corps médical fort bien organisé, ainsi que les politiques, de plus en plus stratèges, sont des communicateurs aguerris. Les médias vont mettre en relief les insuffisances de la démarche judiciaire, puis montrer qu’ils constituent une alternative crédible face à un système qui masque la vérité. Le nombre des inculpés est jugé insuffisant, ce qui conduit parfois les journalistes à considérer le docteur Garetta comme un bouc émissaire, et surtout à s’interroger sur le rôle de l’Etat dans cette affaire et sur la notion de service public. À travers l’Etat, le doute est semé sur l’administration dans son ensemble, et par-là même, sur la légitimité du juge à rendre un verdict. Le procès du sang contaminé est l’occasion d’une dénonciation de la logique marchande qui gagne la sphère publique. Qu'en est-il aujourd'hui?
La santé publique relevant de la politique de la nation, les dysfonctionnements du système politico-administratif, révélés par l’affaire du sang contaminé engagent la responsabilité politique des trois ministres accusés. Dès lors, ils doivent rendre des comptes à la nation.
Les réactions de dénégation des ministres face aux accusations pénales ont été compréhensibles. Par contre, on ne conçoit pas qu’aucun d’entre eux n’ait reconnu sa responsabilité politique concernant les fautes commises par son ministère ou son propre gouvernement.
Les ministres semblent ignorer ce qu’est précisément la responsabilité politique. Certains d’entre eux, comme Georgina Dufoix, parle d’une responsabilité collective qui serait opposée à une responsabilité individuelle. D’autres, comme Laurent Fabius, parlent d’une responsabilité morale à côté d’une responsabilité pénale. Ils semblent ignorer que la responsabilité politique est un point de Droit constitutionnel et que sa nature véritable est celle d’une responsabilité pour fait d’autrui. Ils oublient qu’ils ont à assumer une responsabilité politique qui est la leur et qui découle de leur statut de ministre.
Le chef politique fixe les objectifs et le fonctionnaire agit au niveau des moyens. La neutralité de ce dernier et le fait qu’il ne prenne aucun risque politique est la contrepartie de son irresponsabilité politique. Cette règle constitue l’un des piliers de la responsabilité politique en régime parlementaire. Toutefois, la responsabilité individuelle d’un ministre du fait de son administration ne figure pas dans la constitution de la cinquième République.
La cour de justice de la république française relaxe le ministre Georgina Dufoix et le Premier ministre Laurent Fabius bénéficie d’un non-lieu et d’une réhabilitation honorable : « L’action de Laurent Fabius a contribué à accélérer les processus décisionnels. »
La cour de justice de la république reconnaît coupable de deux contaminations, le secrétaire d’Etat à la santé Edmond Hervé « pour manquement à une obligation de sécurité ou de prudence». Le seul contre qui sont retenues les fautes de retard dans la généralisation du dépistage, l’absence de sélection des donneurs, et l’interdiction tardive des produits sanguins non chauffés. Culpabilité d'Edmond Hervé pour homicide involontaire dans le décès de Sarah M., contaminée au stade fœtal, par sa mère, transfusée le 25 avril 1985 et d’atteinte involontaire à l’intégrité physique de Sylvie R. Edmond Hervé aurait dû « donner les instructions nécessaires pour que soient recherchées et rappelées les personnes susceptibles d'avoir été antérieurement contaminées par voie de transfusion sanguine. » Déclaré coupable, mais dispensé de peine. Selon les juges « quinze ans se sont écoulés depuis les faits… Au cours de ces années, de nombreuses thèses se sont opposées au sujet de l'affaire du sang contaminé, portant des accusations sur l'action et la responsabilité des ministres sans que ceux-ci aient été en mesure de se défendre. » Ainsi, Edmond Hervé « n'a pu bénéficier totalement de la présomption d'innocence en étant soumis avant jugement à des appréciations excessives. »
Pour l'historien Michel Winock, qui estime que le sacrifice du bouc émissaire n'a pas disparu des sociétés modernes, les responsables ne sont pas les politiques: «Que faisait, que disait, au cours de ces mois dramatiques de 1985, le conseil de l'Ordre des médecins qui a pour mission d'avertir les pouvoirs publics? Rien. On accuse trois ministres d'avoir pris du retard dans une décision d'ordre médical, alors que les plus hautes instances médicales du pays, le conseil de l'Ordre non plus que l'Académie de médecine ne se sont sentis concernés! »
Ordre des médecins dont la naissance remonte au gouvernement de Vichy. Ordre qui, selon une décision rendue par la Cour européenne des Droits de l’Homme, en janvier 2000, « serait de par la composition même de ses membres et par son mode fonctionnement, à la fois partial et irrespectueux des droits de l’homme. » Les différentes instances de cet Ordre s’acharnent à détruire systématiquement les médecins indépendants qui osent pratiquer une médecine différente.
En mai 1999, une plainte pour « homicide involontaire » déposée contre l’ancien ministre de la Santé, Claude Evin, est déclarée recevable. Plaintes de patients et de l’association française des transfusés, lui reprochant de ne pas avoir organisé, lorsqu’il était ministre, 1988-1991, le rappel des personnes transfusées avant le 1 août 1985, date de l’entrée en vigueur du dépistage systématique du sida dans les dons du sang. Claude Evin a déclaré : « Un rappel généralisé aurait provoqué une confusion ingérable par les centres de dépistages. De même, une demande directe aux établissements de rechercher les personnes à risque nous est apparue inefficace et dangereuse. Le choix a été fait de sensibiliser le corps médical par une lettre accompagnée d’une brochure. » En novembre 2003, le non-lieu est requis. Les transfusés contaminés n’ont pas été alertés, ni retrouver, ni dépister, de peur qu’ils ne forment un groupe de pression?
Les mesures de rappel n’ont été prises qu’en 1993 par Bernard Kouchner. Or le non-rappel a eu pour conséquence que des transfusés contaminés risquaient, n’étant pas dépistés ni informés, de contaminer leurs proches à leur insu.
En mai 1999, le Juge d’instruction de Paris clôt son instruction en demandant le renvoi de vingt neuf personnes devant la cours d’Assises. À l’encontre de trois responsables du CNTS, il retient « l’empoisonnement ou la complicité d’empoisonnement». Les vingt six autres responsables de l’administration sont poursuivis pour « violence volontaire ayant entraîné la mort sans intention de la donner », « non-assistance à personne en péril pour avoir participé à des études sur la progression des contaminations sans rechercher d’autres moyens de traitement » et « homicide involontaire ou blessures involontaires ». Il leur est reproché la poursuite de la distribution de lots contaminés pendant le premier semestre 1985, le retard dans la mise en œuvre d’un dépistage obligatoire sur fond de rivalité industrielle, la poursuite de collecte de sang dans des lieux à risque tels que les prisons, et le non-rappel des transfusés.
À la lumière de la nouvelle loi Fauchon, proposée et votée en toute hâte le 10 juillet 2000, qui prévoit qu’ « il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d’autrui », il est demandé à la chambre d’Accusation de Paris, l’abandon des poursuites. Le même Code pénal, sous l’article 221-6, réprime pourtant « le fait de causer par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquements de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements la mort d’autrui. »
Pierre Fauchon, avocat, juge titulaire, membre de la cour de Justice, membre de la Haute Cour de Justice, et sénateur, est l’auteur de cette loi du 10/07/2000 sur les délits intentionnels. La nouvelle loi vise à alléger la responsabilité des administrations et personnes physiques en cas d’homicide ou de blessures involontaires. Loi qui limite la notion de responsabilités au seul cas de transgression d’un règlement et protège ceux qui par, bêtise et négligence (article 221-6 du Code pénal) n’auront pas mis en œuvre les réglementations nécessaires qu’ils se doivent de produire. Une personne physique est déclarée responsable s’il est établi qu’elle a « soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement », « soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elle ne pouvait ignorer. » (article 121-3 du Code pénal)
La loi Fauchon favorise ainsi l’impunité en renforçant les exigences sur la démonstration d'un lien de causalité entre faute et dommage. Plus le juge remonte la chaîne des responsabilités, plus le lien avec la faute est indirect. La loi Fauchon sera un obstacle supplémentaire et de taille dans les procès qui suivront.
L’ancien directeur général de la santé, Pierre de Touche, était chargé de faire remonter les informations des médecins au sommet de l’Etat. « Vous adressiez-vous directement aux ministres ? » interroge le président. « Non, à leurs cabinets. Les informations leur étaient transmises notamment par le docteur Brunet, (le monsieur sida du cabinet d’Edmond Hervé), et le professeur Weisselberg, (conseiller scientifique du même Edmond Hervé). »
Juillet 2002, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris décide d’accorder un non-lieu aux 30 personnes, médecins et conseillers ministériels, fonctionnaires de santé et dirigeants de l’Institut Pasteur, poursuivies pour avoir prescrit ou distribué en 1985 des produits sanguins contaminés par le virus du sida.
En juin 2003, La cour de cassation confirmera le non-lieu général et définitif. La décision a pourtant reconnu que le CNTS a écoulé ses stocks contaminés et que le dépistage à fait l’objet de manœuvres retardatrices destinées à protéger les parts de marché du test de l’Institut Pasteur, mais elle confirme l’arrêt de juillet 2002 qui concluait à « l’absence de toute infraction de quelque nature que ce soit »… Selon elle, l'empoisonnement suppose l'intention de tuer. Non le fait de savoir que le produit utilisé contient un virus mortel. Il n'y a empoisonnement qu'avec la ferme intention de tuer, et non si la lâcheté, l'incompétence et les pressions sont responsables de la mort. « L'incertitude demeure sur l'existence d'un lien de causalité entre les faits reprochés et le dommage. » C’est-à-dire qu'on ignore quel jour et avec quel lot ont été contaminées des victimes qui étaient transfusées quotidiennement ! Le 3ème procès du sang contaminé se termine. La Cour de Cassation a suivi les conclusions de l’avocate générale, Dominique Commaret, qui, lors de sa réquisition affirmait : «La justice pénale n’a pas pour vocation de désigner un coupable pour tous les accidents de la vie. » Affaire classée.
Le signal est important pour les futurs procès concernant les hormones de croissance, la maladie de Creutzfeldt-Jakob, l’hépatite B et C, l’amiante, etc.
On sait depuis les années 1970 que le plasma sec transfusé aux hémophiles a transmis des hépatites B et C. Pourtant le plasma sec n’a été interdit en France qu’en 1987. Egalement pour raisons financières. On estime que quatre vingt cinq mille personnes en France ont été infectées par le VHC, suite à une transfusion. En 2006, ce chiffre a doublé. 80% des hémophiles sont contaminés par le VHC, qui est devenu leur première cause de mortalité.
L’Association Française des Hémophiles, (AFH) et les associations de transfusés ont participé à l’élaboration de la loi du 31 décembre 1991 d’indemnisation des hémophiles et des transfusés contaminés par le VIH. L’AFH a participé également à la mise en place de la loi sur l’aléa thérapeutique, et milite pour l’indemnisation des personnes contaminées par le virus de l’hépatite C. La création d’un fond spécifique d’indemnisation pour l’hépatite C a été proposé à plusieurs reprises mais n’a pas abouti. Aucun système réglementaire d’indemnisation n’existe. Seule la loi du 4 mars 2002 (art 102) sur le droit des malades évoque la contamination par le virus de l’hépatite C, mais n’a nullement trait à la mise en place d’une quelconque procédure d’indemnisation systématique. Les victimes devaient entamer une procédure contentieuse.
Cependant, l'Association Française des Hémophiles a obtenu en décembre 2008 que soit mis en place un processus d'indemnisation transactionnel - sur la base de la jurisprudence- pour les contaminations VHC transfusionnelles. Les décrets d'application sont en cours d'élaboration au Conseil d'Etat. Ce nouveau dispositif devrait fonctionner à partir de 2010.
Alors que le dépistage sur les dons du sang était applicable depuis le 1er août 1985 et que le chauffage des produits sanguins était appliqué depuis le 10 mai 1985, la France, par le biais du CNTS, a continué à commercialiser à l’étranger du sang contaminé et des dérivés sanguins au moins jusqu’en octobre 1985. Notamment en Afrique du Nord, Tunisie, Libye, Irak, Algérie, peut-être en Afrique subsaharienne.
Il faudra vingt ans pour s’apercevoir que la lutte contre le sida est aussi une affaire de santé dans les pays du Sud.
En 2000, le gouvernement de Bagdad a accusé le laboratoire français Mérieux, aujourd’hui Aventis-Pasteur, d’avoir exporté du sang contaminé en Irak, et a réclamé plus de 30 millions de dollars de dédommagements. Dans les locaux de l’unique centre de prévention contre le sida, Sabhan Mohamed, un hématologue, affirmait que « 500 flacons de facteur F8 ont été importés de France en 1986 ». Le facteur 8 est un médicament dérivé du sang, destiné au traitement de la forme la plus répandue d’hémophilie, qu’il soit chauffé ou non. « Nous avons découvert durant la guerre contre l’Iran, 1980-1988, que ces produits étaient contaminés, et nous avons cessé de les utiliser, mais de nombreux enfants hémophiles ont en reçu des doses... Nous avons recensé officiellement 180 cas de contamination par ces produits, mais il s’agit de chiffres officiels, et leur nombre pourrait être bien plus important, entre 500 et 700 contaminations. » Le groupe français a indiqué à plusieurs reprises qu’il « n’avait eu connaissance à ce jour d’aucun élément permettant d’affirmer une éventuelle contamination du facteur 8 anti-hémophilique qu’il a mis sur le marché.» « Le dernier lot, livré en février 1986, comportait 403 flacons de facteur 8. L’institut n’étant pas autorisé à prélever du sang en France, ce traitement destiné aux hémophiles avait été fabriqué à partir de plasma américain, prélevé sur des donneurs sains dans des centres agréés par les autorités sanitaires américaines » a rappelé Aventis-Pasteur.
« Les entreprises concernées Sanofi-Aventis et américaine Baxter, héritières des compagnies qui fournissaient en sang le ministère irakien de la Santé au début des années 1980, ont offert de 5.000 à 25.000 dollars de dédommagements à chaque victime.(…) Nous sommes entrés en contact avec des entreprises pharmaceutiques, avec l’aide de la Ligue des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant rouge, pour obtenir des traitements de trithérapies, mais nous n’avons rien reçu» déclare le responsable du Croissant rouge Irakien. Cette amertume est partagée par le Dr Hanan Abdel-Karim, dont le frère est mort du Sida en 1996, à l’âge de 16 ans, 8 ans après avoir été contaminé. « Je me souviens que les autorités l’avaient enfermé dans un camp où on lui donnait sa nourriture par la fenêtre, comme dans une prison. Après sa mort, ils l’ont enfermé dans un cercueil de plomb fermé … Même notre famille a cessé de nous rendre visite, de peur d’attraper la maladie, et moi et mes sœurs, nous n’avons pas pu nous marier pour la même raison. »
En Libye, des centaines de familles ont perdu leurs enfants et les ont vus atteints par le virus du sida, à l’occasion de leurs soins hémophiles. Le sort de cinq infirmières et d’un médecin palestinien condamnés à la peine de mort, détenus plus de huit ans, n’a pas laissé indifférent. La justice libyenne a retenu les conclusions des médecins libyens : « les données en notre disposition n'excluent pas la possibilité d'une transmission intentionnelle du virus aux enfants infectés. » La communauté scientifique internationale  estime que les accusés sont innocents et que l'épidémie de sida a été provoquée par le manque d'hygiène. D’après un rapport des Professeurs Montagnier et Colizzi : « aucun élément évident ne permet de conclure  à une injection intentionnelle par matériel contaminé du virus. » Le rapport ajoute que « l'étude épidémiologique de l'infection des victimes  permet de conclure que leur séropositivité est antérieure, pour que cette possibilité soit retenue contre les accusés. »
Le fils aîné du dirigeant Kadhafi, a assuré que les cinq infirmières bulgares condamnées à mort, ne seront pas exécutées. Le président Nicolas Sarkozy a fait état, le jour de la libération des infirmières le 24 juillet 2007, d'un «geste humanitaire » de l'émirat du Qatar, «un Etat ami». Interrogé à ce sujet, Saïf al Islam Kadhafi répond : «Nous n'avons pas posé de questions. Nous ne voulons pas embarrasser nos amis. » Pour sa part, Bernard Kouchner a affirmé qu'il n'y avait pas eu de contreparties financières versées par Paris à Tripoli.
En France, dès octobre 2005, la Cour de Cassation avait confirmé qu’il n’y aurait aucune indemnité pour les hémophiles transfusés à l’étranger avec du sang français.




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